“Et puisque départir nous fault”: embarquement théâtral immédiat

© Christophe Raynaud de Lage – photographie libre de droits, hors presse nationale

Comment faire équipage « quand les autres qui ne sont pas nous » ont cessé de croire au miracle ? Ou encore commencer une aventure, avec panache, en sachant que celle-ci va se terminer ? Pour répondre à ses interrogations, Céline Feuillet, jeune metteuse en scène, s’est transformée en Capitaine, à la Kantor*, d’une embarcation de cinq personnages clownesques.  

Cette création a pour origine une résidence au Festival international de Milos, petite île des Cyclades en Grèce. Cécile Feuillet y construit un radeau, avec l’aide des habitants, à partir de matériaux récupérés. « C’est l’objet qui fait d’abord émerger l’histoire, et pas l’inverse ». Lors de sa mise à l’eau, le radeau fait l’objet d’une inauguration, avant de mystérieusement disparaître… Dans le spectacle, il devient alors un personnage à part entière, tout comme la magnifique méduse, aux longues tentacules, qui trône sur le flanc de la scène.

Dès la descente des escaliers, nous sommes embarqués dans l’univers du spectacle. Des bouts de draps sont accrochés sur les murs, rappelant des voiles de fortune. Puis, nous découvrons un musée, où, au milieu d’objets farfelus, un zombie-pirate s’expose lui-même dans le cadre d’un tableau. Installé dans une configuration bi-frontale, le public agit durant tout le spectacle, en tirant sur des poignets et déclenchant quelques scènes d’improvisation. Lorsque la voile du radeau est hissée, une partie du public voit un spectacle différent de celle qui est en face, ce qui crée une résonance presque intime avec les comédiennes.

Le spectacle rappelle évidemment au spectateur l’imaginaire du Radeau de la Méduse. Néanmoins, si le tableau de Géricault renvoie au cannibalisme et aux luttes intestines, la pièce met surtout en lumière la solidarité de cinq individualités qui font expérience commune de l’ivresse, du délire, et finalement de l’échec. « Nous refusons un monde où le miracle serait encore en recherche non trouvée ».  Quand elle s’adresse à son équipage, la capitaine – en référence à Ariane Mnouchkine – conserve un vœu d’espérance : « euhc’est par là ! ».

* Tadeusz Kantor (1915-1990) est un metteur en scène polonais, souvent présent au plateau dans ses pièces, dont s’inspire Cécile Feuillet.

Et puisque départir nous fault Cécile Feuillet 

Compagnie Marée Basse 

Jusqu’au 26 novembre au Théâtre de la cité internationale

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